Et si une passerelle pouvait faire plus que franchir un obstacle ?
Pensée comme un trait d’union entre territoires, histoires et habitants, la passerelle de Caster incarne une vision forte : celle d’une reconnexion physique, symbolique et culturelle.
Rencontre avec les porteurs du projet : une immersion dans les origines, les enjeux et les ambitions d’un symbole ancré dans son territoire… Et tourné vers l’avenir !
Qu’est-ce qui vous a poussés à créer une passerelle à cet endroit précis ?
L’endroit n’a pas été choisi au hasard. Il s’agissait de restaurer un ancien chemin de liaison historique entre Maastricht et Liège, un ancien axe militaire sur les crêtes de la Montagne Saint-Pierre. Même s’il est aujourd’hui morcelé par les carrières et le canal Albert, on en retrouve encore des traces. À plusieurs endroits, on parle toujours de la « route de Liège ».
La passerelle permet de reconnecter ce tracé, de réparer une mémoire territoriale. Mais elle va plus loin : elle relie aussi une portion de territoire wallon restée enclavée entre Meuse, canal et Geer, aujourd’hui principalement accessible par Riemst. On réintègre cette zone dans la Wallonie.
Et puis il y a cette dimension symbolique : on relie Bassenge et Visé. La passerelle coupe littéralement la frontière communale. C’est une invitation à franchir les limites, à tisser du lien entre les territoires !
Vous dites que "ceci n’est pas une passerelle". Pourquoi ?
Parce que la passerelle de Caster n’est pas une attraction. Ce n’est pas une finalité. C’est un outil. Un levier pour reconnecter les gens, les lieux, les histoires. Elle lie des points d’intérêt comme la Villa Castrum ou le Fort d’Eben-Emael, tout en servant d’outil pédagogique sur la nature, la géologie ou l’histoire militaire et culturelle.
Ce territoire est incroyablement riche ! Sur un petit espace, on trouve de la géologie, de la biodiversité, de l’architecture, des traditions comme le cramignon, du pâturage… Et même de la viticulture. La passerelle de Caster permet de lire ce paysage complexe et de changer de regard…
Quelles problématiques régionales la passerelle de Caster vient-elle résoudre ?
Il y a un vrai besoin de recréer du lien entre des régions très proches géographiquement mais éloignées culturellement, linguistiquement.
On veut rétablir une cohérence entre Wallonie, Flandre et Limbourg hollandais. Et ça commence ! Au sein du Parc Frontalier, nous nous réunissons régulièrement avec nos voisins flamands et néerlandais. Débutée autour de sujets écologiques et environnementaux, cette collaboration pourrait se développer dans d’autres domaines (économie, mobilité, enseignement…).
Et au-delà du symbolique, la passerelle de Caster agit comme déclencheur : les communes de part et d’autres des frontières discutent de vélos en libre-service, de nouvelles liaisons, de signalisation touristique partagée…
On crée un cadre pour des coopérations qui n’avaient jamais eu d’outil structurant jusqu’ici.
En quoi la géologie est-elle centrale dans le projet ?
Le tuffeau est partout ! Il façonne les falaises, les anciennes carrières, les galeries souterraines… Mais aussi l’architecture. Il est l’ADN culturel du territoire.
La passerelle permet une immersion à ciel ouvert dans cette géologie : on survole les falaises, on touche la roche, on voit les plantes calcicoles… Et on relie des lieux clés comme le Fort d’Eben-Emael et la Ferme de Caster, bâtis en marne. Tout est lié.
À qui s’adresse la passerelle de Caster ?
Tout le monde est bienvenu bien sûr. Mais il faut aimer marcher, explorer. L’accès n’est possible qu’à pied. Les parkings et points de départ sont éloignés de la passerelle . Les sentiers sont escarpés, parfois rocailleux.
C’est une expérience lente, immersive… On ne vient pas ici comme on irait au parc du coin. C’est un passage qui se vit, presque contemplatif. Une petite aventure !
Quelles mesures ont été prises pour protéger le site ?
Il y aura un contrôle du nombre de visiteurs par heure, via un système de réservation avec ticket. L’objectif, c’est de garantir la qualité de l’expérience tout en protégeant la nature et en préservant la qualité de vie des riverains.
Les recettes seront réinvesties dans la protection et le renforcement de la nature précieuse de la région, … On prévoit aussi des tarifs préférentiels pour les familles et les riverains, à définir collectivement.
Comment le projet est-il co-construit ?
On est en train de mettre en place un comité d’avis qui réunit des naturalistes, des riverains, les communes voisines, des administrations concernées, … On construit ensemble, on s’adapte.
Le projet ne sera réussi que lorsque les habitants et les parties prenantes adoptent la passerelle comme leur passerelle.
. Chacun peut s’y reconnaître. C’est essentiel pour l’appropriation du projet.
Quels sont les partenaires clés ?
Le DNF est un acteur central. Sans eux, le projet n’aurait pas vu le jour. Les Voies Hydrauliques aussi, pour tout ce qui touche au Canal Albert et à la Meuse.
Le ministère de la Défense a été le tout premier à donner son feu vert. Et bien sûr, le financement vient du Plan de relance Wallon post-Covid. Ça montre que la passerelle de Caster s’inscrit aussi dans un objectif de résilience sociale et territoriale.
Enfin, que souhaitez-vous que les visiteurs ressentent en traversant la passerelle de Caster ?
Qu’ils soient curieux. Qu’ils aient envie de découvrir la région, d’explorer !
On veut que ce soit une invitation à lever les yeux, à ralentir. Les passerelles se ressemblent souvent dans le monde : deux câbles, des planches. Ici, c’est autre chose. Le design, imaginé par l’architecte liégeois Vincent Servais, repose sur un seul câble. C’est une prouesse esthétique… Et tout est pensé local.
Oui, ce n’est pas juste une passerelle : c’est un symbole.
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